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  • Société

De moins en moins d’élèves comprennent ce qu’ils lisent

03.04.2020 – Mireille Guggenbühler

Lire un texte et le comprendre est une compétence qui s’amenuise chez les écoliers suisses, révèle l’étude PISA. D’après la représentante des enseignants de Suisse, il s’agit en fait d’une crise linguistique.

Sur un forum Internet sur la santé des volailles, Isabelle, éleveuse de poules, s’interroge: «Est-ce que je peux donner de l’aspirine à ma poule? Elle a deux ans et je pense qu’elle s’est blessée à la patte. Je ne peux pas aller chez le vétérinaire avant lundi, et je n’arrive pas à l’avoir au téléphone. Elle a l’air d’avoir très mal. J’aimerais lui donner quelque chose pour la soulager.»

La question d’Isabelle fait partie d’un exercice de la dernière enquête PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves), une étude comparative menée tous les trois ans dans les pays membres ou partenaires de l’OCDE. L’objectif est d’évaluer les compétences d’élèves de 15 ans dans les domaines de la lecture, des mathématiques et des sciences naturelles.

La poule a-t-elle besoin d’aspirine ou d’un vétérinaire?

La dernière étude PISA a porté une attention particulière à la lecture. L’exemple du forum Internet sur la santé des volailles est tout à fait représentatif: les élèves de 15 ans devaient lire la question d’Isabelle et comprendre ce qu’elle cherchait à savoir. L’éleveuse de poules veut-elle savoir si elle peut donner de l’aspirine à sa poule blessée ou à quelle fréquence elle peut lui en donner? Demande-t-elle comment trouver un vétérinaire? Ou cherche-t-elle un moyen de déterminer le niveau de douleur de sa poule blessée?

À l’ordinateur, les élèves devaient cliquer sur la bonne réponse. C’est la première fois que de tels exercices interactifs faisaient partie du test à côté des exercices de lecture classiques avec des textes imprimés. D’après les personnes ayant mis en forme les résultats de l’étude pour la Suisse, cela est logique: la conception des tests PISA doit tenir compte de l’évolution de la société, et notamment de la «révolution numérique». La définition des compétences en lecture tient par conséquent désormais compte de la faculté d’utiliser les médias numériques.

Comparés aux chiffres de 2015, les résultats suisses de l’étude montrent plusieurs évolutions:

  • Les compétences en lecture des jeunes ont reculé.
  • Le plaisir de lire a baissé chez les jeunes.
  • La part des élèves faibles en lecture a augmenté.

Certes, pour ce qui est de la lecture, la Suisse ne se situe pas très loin de la moyenne de l’OCDE. Mais des pays européens comme la Finlande, la Suède, l’Allemagne, la France ou la Belgique obtiennent de nettement meilleurs résultats que la Suisse.

Aujourd’hui, on regarde des films pour se détendre

Pourquoi, en Suisse, les compétences en lecture et le plaisir de lire ont baissé chez les jeunes tandis que la part d’élèves faibles en lecture a augmenté?

Dagmar Rösler est présidente de l’Association faîtière des enseignant-e-s de Suisse (LCH): à ce poste, elle est tous les jours confrontée à des questions concernant la formation. Les résultats de l’étude PISA correspondent à ce qu’elle vit comme enseignante: «À l’école, je constate également que les élèves lisent moins. Les médias numériques concurrencent les livres. Pour se détendre, on préfère regarder des films que lire des livres.»

Les résultats de l’étude PISA corroborent cette affirmation: 50 jeunes Suisses sur 100 ont révélé, dans le cadre de l’étude, n’avoir aucun plaisir à lire. En 2000, ils n’étaient encore que 30 sur 100. Or, dans la lecture, plaisir et compétences sont étroitement reliés, selon l’étude. Doit-on ainsi davantage encourager le plaisir de lire à l’école? «Nous faisons déjà beaucoup dans ce sens. Les enseignants sont conscients que la lecture est très importante», indique Dagmar Rösler. Et de compléter: «L’école est probablement le lieu où les jeunes lisent momentanément le plus et doivent le plus réfléchir à ce qu’ils ont lu.»

La crise de la lecture est-elle une crise linguistique?

Il faudrait également investir dans les compétences en lecture au cours de la petite enfance, à la maison, en famille, pense Dagmar Rösler. L’étude PISA montre notamment aussi qu’un quart des élèves testés obtiennent des résultats très médiocres en lecture. Une bonne part de ce quart sont des élèves issus de la migration. Les élèves issus de familles au sein desquelles on parle dans la langue du test s’en tirent visiblement mieux.

La crise de la lecture est-elle donc, au fond, une crise linguistique? «Les enfants qui commencent l’école avec un déficit linguistique le combleront difficilement», révèle Dagmar Rösler. «La Suisse est trop peu avancée en matière de soutien linguistique précoce.» Il y a toutefois des exceptions: le canton de Bâle-Ville passe pour être un modèle en la matière. Les autorités bâloises demandent à toutes les familles de remplir un questionnaire sur les connaissances en allemand de leurs enfants avant leur entrée au jardin d’enfants. Lorsque des lacunes sont mises en évidence, les enfants doivent suivre un cours d’allemand obligatoire l’année précédant leur admission au jardin d’enfants. Ce cours est gratuit. La ville de Coire propose elle aussi à partir de cet été un cours de soutien linguistique. Il est obligatoire pour les enfants qui ne parlent pas assez bien l’allemand 18 mois avant d’entrer au jardin d’enfants. La ville de Lucerne travaille actuellement à un modèle similaire, et pour la première fois en janvier de cette année, elle a envoyé aux parents un questionnaire ressemblant à celui de Bâle-Ville. Dans le canton de Zurich, par contre, la commission cantonale de formation a rejeté il y a un an une initiative parlementaire visant à adopter le modèle bâlois. Pour Dagmar Rösler, l’étude PISA révèle en fin de compte qu’il est surtout nécessaire d’agir dans un domaine: «En Suisse, nous devons progresser en matière d’égalité des chances.»

L’enquête PISA en Suisse

En 2018, 600 000 élèves de 79 pays ont participé aux tests de la dernière étude PISA, dont les résultats sont à présent connus. En Suisse, 6000 élèves nés en 2002 y ont pris part. Les tests, qui se sont déroulés dans 200 écoles suisses, ont permis de dégager des valeurs moyennes pour tout le pays. Les données du test ne permettent pas de faire une comparaison entre les cantons ou les régions linguistiques. En comparaison internationale, c’est dans le domaine des mathématiques que les jeunes Suisses ont obtenu les meilleurs résultats. En sciences naturelles aussi, la moyenne suisse se situe nettement au-dessus de la moyenne de l’OCDE.

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Commentaires :

  • user
    Arye Ophir, Israel 23.04.2020 à 16:15
    Ein kompliziertes, interessantes Kapitel. Ein guter Artikel übrigens!
    Lesen und nicht begreifen, wissen und nicht verstehen, Information ohne Beziehung - eine zunehmend beängstigende Erscheinung in unserer Gesellschaft. Ich bin kein Fachmann auf diesem Gebiet, aber irgendwie scheint es mir naheliegend, dass die eben oben genannten Erscheinungen einen gemeinsamen Nenner in der Erziehung bzw. in der Unerziehung haben im Verhaltensvorbild der Erwachsenenumwelt, wo der abnorme Informationshunger - ohne "Verdauungsorgane" - längst eine krankhaft gängige Sache ist.
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  • user
    Ilona Philips, Floride, USA 30.03.2020 à 22:25
    Et c'est bien malheureux qu'ils n'aiment pas lire... leur orthographe s'en porterait bien mieux... nos excellentes écoles ne sont pas mises en valeur quand je vois des ecrits et commentaires sur les sites sociaux, qui sont bourres de fautes de grammaire, même quand ils postulent pour un emploi et sur leur curriculum-vitae; c'est bien triste...
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  • user
    Marianne FABESCH, Nice, France 29.03.2020 à 23:12
    L'affaissement du geste manuscrit doit certainement participer à ce recul du goût à lire. Une étude faite il y a quelques années au CNRS montrait que, pour 2 groupes d'enfants, celui qui avait conservé la pratique manuscrite cursive avait un score de lecture plus élevé que celui qui n'avait plus cette pratique manuscrite.
    Ne s'agit-il pas tout simplement de redonner le goût de l'écriture manuelle aux enfants ?
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  • user
    Danielle Dériaz , Paris 12, France 29.03.2020 à 15:59
    Francophone depuis ma naissance, je ne comprends pas quelle réponse "évidente" devait conclure l'histoire de la poule. TOUT
    ce que demandait Isabelle était de première importance. Elle faisait part de solutions alternatives parce qu'elle n'avait pu avoir son vétérinaire au téléphone et que les consultations ne reprenaient que lundi. La douleur visible de sa poule la préoccupait autant qu'un médicament à lui donne immédiatement.
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    Bernard Moret, Hawaii, USA 29.03.2020 à 01:29
    Cette tendance est generale -- elle se voit dans toutes les langues. Cependant, elle peut dependre de l'offre de lectures pour les jeunes et est donc souvent pire dans les communautes linguistiques de petite taille ou dans celles ou la literature pour les jeunes est relativement peu primee.
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  • user
    Ajita Cannings, Lismore, NSW, Australia 28.03.2020 à 23:45
    It is excellent to see some Cantons adopting early intervention programs during early childhood, this is when there will result the greatest effect. Enjoying literature is just like any other part of our culture or society we value, we can't afford to take it for granted and must continue to strive for a place and space for reading at home and in schools.
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  • user
    Jean Porto, Portugal 28.03.2020 à 09:13
    Bravo !

    Article conçu en dépit du bon sens...

    Pourquoi interroger une présidente, certainement respectable d’une association faîtière, manquons nous de linguistes spécialisés pour diffuser un avis un peu plus élaboré ?

    Pourquoi ne pas avoir communiquer les résultats de l’étude PISA ?
    Sommes nous, lecteurs qui cherchons à comprendre le sens des mots, trop bêtes pour qu’on nous les communique ?
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    • user
      Ilona Philips, Floride, USA 30.03.2020 à 22:32
      réponse à M. Jean Porto -- "Pourquoi ne pas avoir communiquer les résultats de l’étude PISA ?" --- communiqué ...
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  • user
    Immer Markus, Philippinen 28.03.2020 à 04:22
    Gerade PISA ist einer der Gründe für die Verdummung! Dazu kommt eine Gesellschaft, bequem geworden, vollgefressen, verweichlicht und anmassend mit Forderungen die vergisst, dass für alles Leistung erbracht werden muss. Eigene Leistungsträger, die aus unserer Kultur stammen gibt es aber schon lange kaum noch! Dafür haben wir jetzt Deutsche, Amerikaner, Chinesen, Muslime u. andere mehr- od. minder freundliche Kulturträger im Land, die ganz andere Vorstellungen von einer Aualitätsgesellschaft haben!
    Den "Schweizer Spirit" gibt es schon lange nicht mehr, ich bin überzeugt, die CH als souveräne Nation wird es auch nicht mehr lange geben, die Gene dazu fehlen überall bis zuoberst in Politik u. Wirtschaft!
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  • user
    Peter Fässler, Vientiane, Laos 28.03.2020 à 00:10
    Die Schule vermittelt Wissen, erzogen wird ein Kind zu Hause. Lesekompetenz kommt zwingend mit Sprachkompetenz - Letzteres gehört ins Elternhaus.
    Der "TV/Internetsucht" wird man nur dann Herr, wenn man täglich das Passwort wechselt und dieses erst nach Erledigen des täglichen Pflichtenhefts erst erhält (Aufräumen, Hausaufgaben, Garten helfen etc.).
    Tönt altmodisch, ist es allenfalls auch, aber wenn Kinder heute nicht lesen können, weil es ihnen "stinkt", dann ist das motivationsarme Umfeld daran Schuld.
    Die mehrsprachige Lesekompetenz basiert, bei den Babyboomer, genau auf solchen Modellen. Wer heute nicht mehr in die Bibliothek will, kann sich über z.B. Kindle oder andere elektronische Lesegeräte (iPad etc.) für zwischenzeitlich wenig bis gar kein Geld Spannendes, Informatives und Lehrendes runterladen und ......... lesen.
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      Arye Ophir, Israel 23.04.2020 à 11:00
      Was für eine armselige Welt, wenn die Schule, das heisst das Lehrpersonal, nur noch reines Wissen vermitteln wird und das noch zu einer Zeit, wo ohnehin das Grau in Grau des Mainstreams jede Farbe im Denken ausradiert.
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