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Le FC Bâle pourrait bien devenir en mai prochain champion de Suisse pour la septième année consécutive. Il cumule de manière exemplaire réussite sportive et réussite économique, auxquelles les jeunes contribuent grandement.
L’homme s’appelle Breel Donald Embolo. Ceci dit, on peut se demander si qualifier le joueur professionnel du FC Bâle d’«homme» convient vraiment. L’attaquant a en effet fêté ses 19 ans en février, ce qui le classe encore dans la catégorie des adolescents. Si ça se trouve, il est peut-être encore en pleine croissance. Et puis, il respire toujours l’enfance. Au cours de cette saison, au terme de laquelle le FC Bâle devrait selon toute vraisemblance obtenir son septième titre de champion consécutif, aucun autre joueur du club n’a pourtant autant contribué à la continuité du succès que ce jouvenceau au visage malicieux.
Récemment élu meilleur joueur de Super League, Breel Embolo est titulaire pour sa première année, ce qui ne l’empêche pas d’être déjà le joueur offensif majeur du leader rhénan du championnat. Bien plus encore: le junior aux origines camerounaises figure parmi les talents les plus convoités du football international. Durant la pause hivernale, le VfL Wolfsburg, l’un des plus grands clubs de Bundesliga, a proposé une indemnité de transfert de 30 millions de francs pour racheter immédiatement son contrat avec le FCB qui court jusqu’en 2019, et s’assurer ses services dans sa propre équipe. Jamais une somme aussi élevée n’avait été proposée pour un joueur titulaire d’un passeport suisse ou jouant en ligue suisse. Les Bâlois ont poliment décliné l’offre.
Si les dirigeants peuvent se le permettre, c’est parce que la success-story des rouge et bleu ne se résume pas à une collection de coupes de champion dorées. Au FCB, succès sportif et succès économique sont intimement liés, l’un n’allant pas sans l’autre. L’entreprise footballistique du Parc Saint-Jacques se trouve dans une interaction constante, presque une spirale positive. Cela ne va pourtant pas de soi: il s’agit là du résultat d’un excellent travail, réalisé à tous les niveaux mais surtout par la direction. Bernhard Heusler, président du conseil d’administration, est le premier nom qu’il faut citer. Ce juriste économique bâlois a repris en 2009 la conduite opérationnelle du club alors qu’il en était vice-président. Si le FCB avait retrouvé à cette époque son éclat des années 60 et 70 grâce au mécénat de son ancienne présidente Gigi Oeri, la direction clairvoyante de Heusler a fait naître une entreprise de football indépendante et autofinancée qui laisse la concurrence nationale toujours plus loin derrière elle à tous les points de vue. Alors que tous les autres clubs rêvent de remporter le titre avec des budgets entre 10 et 30 millions de francs, le budget de base du FCB est deux fois supérieur à celui de ses rivaux les plus riches. Sans compter les réserves: grâce aux bons résultats réguliers en Europa League, et parce que les meilleurs professionnels présents sur la scène internationale figurent sur les carnets de recrutement des géants des grandes ligues étrangères, les primes et indemnités de transfert annuelles permettent au club bâlois de gagner plus d’argent qu’il n’en dépense.
Ainsi, 30 millions de francs ont été récemment mis de côté. Il faut s’attendre à ce que cette somme soit bientôt encore supérieure. Parce que l’exercice 2015 affiche des chiffres bénéficiaires. Parce que Mahomed Elneny, joueur observé attentivement dans un premier temps avant d’être acheté pour 800 000 francs puis finalement perfectionné au sein de l’équipe professionnelle, a été transféré en janvier vers le FC Arsenal, club de la Premier League anglaise lourde de plusieurs milliards, pour une indemnité de près de 14 millions de francs. Et, justement, parce qu’il y a ce Breel Embolo.
Si tout se déroule normalement, il aura contribué de manière conséquente au succès sportif du FC Bâle. Le titre de champion suisse vaut à lui seul quelque 20 millions de francs car il offre une qualification directe pour la très lucrative Ligue des Champions. Chacun est convaincu en outre que durant la pause estivale, Embolo sautera le pas et rejoindra un grand club étranger, contre une indemnité qui rapportera au FCB plus que les 30 millions de francs qu’aurait payés Wolfsburg.
Embolo deviendra alors l’exemple le plus jeune et le plus éclatant du fait qu’investir dans sa propre relève est rentable. Quand il s’agit d’expliquer les raisons du succès du FC Bâle, il est impossible en effet de ne pas mentionner la section des juniors comme étant l’un des piliers de la structure. Depuis l’arrivée de Gigi Oeri au FCB lors du changement de millénaire, la promotion de cette section et son développement qualitatif figurent parmi les objectifs principaux du club. L’argent de la mécène et les compétences professionnelles de personnes telles que Peter Knäbel, directeur technique de la relève de 2003 à 2009, ont permis d’élaborer et de donner vie à un concept qui fait aujourd’hui encore partie des points fondamentaux et fournit régulièrement des joueurs de toute première qualité. Sous l’ère de celui qui est désormais directeur du football professionnel au Hambourg SV, on a commencé à convaincre les meilleurs juniors de toute la Suisse, et non plus uniquement de la région, de venir à Bâle. Là, ces diamants bruts ont été polis pour en faire de jeunes professionnels. Une méthode qui, au bout de cinq années, a porté régulièrement ses fruits avec des joueurs comme Ivan Rakitic, Eren Derdiyok, Yann Sommer, Fabian Frei, Valentin Stocker, Xherdan Shaqiri ou Granit Xhaka. Autant de noms qui ont joué au FCB avant d’être transférés vers l’étranger, avec un gain non négligeable. Tous ces joueurs sont aujourd’hui en équipe nationale. Rakitic est même titulaire au grand FC Barcelone avec lequel il a remporté la Ligue des Champions en 2015. Il a atteint des sommets, et un avenir similaire est promis à Xhaka et Sommer.
Pour construire de la sorte des grandes carrières, avoir du talent et être intégré dans un système qui fonctionne bien ne suffisent pas. Il faut également des entraîneurs de la relève compétents. Le FCB compte aujourd’hui des noms prestigieux parmi ses formateurs, mais aussi des spécialistes moins connus qui n’en sont pas moins importants pour autant. Werner Mogg, par exemple, entraîneur de l’équipe M16, a atteint il y a quelques jours l’âge de la retraite. Celui qui avait déjà formé au FC Aesch Alex Frei et Marco Streller alors qu’ils étaient encore juniors, a été recruté par le FCB en 2002. Il n’a pas l’intention de prendre sa retraite, ce qui est une bonne chose pour les rouge et bleu. Lorsque l’on demande aux joueurs qui ont fait partie de la relève du FCB et de l’équipe fanion avant de rejoindre un club à l’étranger, de quel entraîneur ils ont le plus appris, le nom de Mogg est le plus souvent cité.
Comme tous les entraîneurs d’équipes juniors M14 et plus, Mogg a installé son bureau sur le «campus de la relève» moderne, au sein des installations sportives de Saint-Jacques.
Bâti avec un budget de 20 millions de francs et ouvert en août 2013, ce complexe comprend quatre terrains en pelouse naturelle et un en pelouse artificielle. Dans le bâtiment principal se trouvent, en plus des bureaux, une cantine, une cafétéria publique et des vestiaires pour toutes les équipes, une salle de musculation, des espaces de soins et des bains de récupération.
Un projet qui a été lui aussi soutenu de manière significative par Gigi Oeri. Dorénavant présidente d’honneur du FCB, elle continue à injecter chaque année 2,6 millions de francs dans la fondation «Nachwuchs Campus Basel» qu’elle préside. Ces fonds ne servent pas seulement à financer les coûts de fonctionnement de l’installation moderne, mais aussi à trouver des solutions de scolarisation ou professionnelles pour les juniors, et à assurer l’exploitation de la résidence du FCB située dans le Lehenmatt. Les stars de demain y vivent durant toute leur formation footballistique, tout comme l’ont fait avant eux Fabian Frei ou Valentin Stocker. Le FC Bâle ne cherche pas seulement à former des footballeurs accomplis; il veut aussi produire des jeunes adultes aussi autonomes que possible, et qui soient capables de rebondir si leur rêve de devenir un grand footballeur ne devenait pas réalité.
Breel Donald Embolo est également un parfait exemple de tout cela. Alors qu’il joue début novembre 2014 contre le Ludogorets Razgrad et devient à 17 ans le plus jeune joueur suisse à marquer un but en Ligue des Champions, il parvient à garder les pieds sur terre malgré les nombreux éloges. À cette époque, il suit encore un apprentissage de commerce, et, le lendemain, ce talent du football parmi les plus convoités d’Europe arrive à l’heure à son école professionnelle pour suivre ses cours.
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